Devenir.










Devenir

Venir à décider de me perdre moi-même, est plus important que de condamner des personnes que j'aime, à qui je tiens.
Vient donc le temps que je me brûle, que je brûle la politesse, plutôt la traîtresse.
Vitesse de propagation foudroyante, cette genèse ne doit pas embraser notre race.

Anas De Bernieras







 Voici quelques minutes que j’erre avec cette pensée.
Depuis peu, seul avec elle, en permanence brûlant de sa présence, elle courbe ma prestance.
Avant elle, j’étais comme tant d’autres, fils, frère, mari, père aimant.
Maintenant, je suis captif, mon corps est inactif, déjà consumé de sa brûlure.
L’allure est extrêmement rapide, mon corps est une bûche prête à se consumer.
Amener mon esprit à sortir de cette effervescence est chose impossible, je suis sa mèche qui va allumer toutes les brindilles de nombreuses familles.
Fourmille en moi cette certitude, je suis l’élu pour exterminer une grande quantité de gen.
Chassant toutes lucidités, elle est ce plomb à mes chaussures qui m’empêche de mouver mon dernier pot de terre pour oxygéner mon rosier.
Hébété de ce face-à-face avec cette plante vorace, je suis planté là au milieu de mon espace qui me sert de réalité en ce moment.
Extrêmement diminué, c’est la dernière chose que je puisse dire avec mon cerveau flétri et presque vide dans ce monde dans lequel je n’ai plus mon lieu.
Fiévreux, avec cette bactérie, elle me possède à chaque instant sous une nouvelle forme de destruction toujours plus hideuse, plus ensanglantée à mesure que le temps approche, elle me met à genoux.
Sous cette folie meurtrière, est-ce que j’ai eu vraiment le choix de ces fauteurs, de ces investigateurs qui causent et rient de moi, de leur théorie.
Pris par ce bacille qui me détruit, qui me prive de toute liberté dans mes pas, elle m’obstrue les yeux de l’horizon.
Pression, intimidation, ils m’ont sciemment inculqué ce blaste et acheté avec une idée de crime, de châtiment, de meurtre et de mort sur des milliers de gents sains.
Malins, ils ont manipulé ma transplantation hépatique irréversible pour piloter leur plan diabolique, monstrueux.

 - Dieu ne vous accorde plus la santé, vous devriez passer vos derniers temps à aider les autres, les sauver.
Les peuples ont besoin de milliards pour leur économie, la population sur la planète est trop nombreuse, il faut en sélectionner un certain nombre, il n’y a plus assez de denrées pour les nourrir, le digital doit balayer la main-d’œuvre excessive en coût social.
L’original dans votre cas, c’est qu’il y a un groupe de soutien absolument exceptionnel, qui comprend ce que vous vivez, il peut vous fournir de l'aide, me disent-ils.
                                

Docile comme sous le couperet vertical de la guillotine, ils pensent qu’il n’y a rien pour moi après ma mort.
Lors d’une rencontre avec d’autres confrères et d’autres personnes inconnues, soi-disant de soutiens, toutes masquées, gantées, recouvertes de la tenue de protection chimique, j’ai assisté à la plus haute théorie.
Abasourdi à l’apparition des visages de politiques, de dirigeants, de banquiers, d’hommes d’affaires, sous leurs masques, leurs poignées de mains en signe d’accords mutuels et après leurs propositions de négociations, mon corps s’est paralysé, je suis tombé évanoui.
Assis sur le bord de mon lit, je suis réveillé sans pensée, sans souvenir, juste sentir que je ne suis plus le même homme.
Comme si le froid s’était installé sur tous les os de mon corps, je tire la couverture sur moi pour me rendormir.
Rires et discussions, tous ces bruits viennent de l’extérieur, je me lève très difficilement pour voir ce qu’il se passe sous ma fenêtre.
L’être que je suis devenu, est nocif, je dois m’enfermer pour éviter le monde, lui, il n’est pas malade, il est jeune, son sang coule librement dans ses veines.
Migraine passagère, un peu grippé, enrhumé, ou ayant une petite fièvre, il peut être guéri, moi je ne peux pas être guéri de ma sentence.
Malchance pour moi, mon sursis est rejeté parce que tout est en règle, mes plaideurs ont bien plaidé, ils ont laissé sur la table de ma chambre les conditions de ma greffe, le lieu pour récupérer la substance destinée à neutraliser l'effet du poison en moi, et si nécessaire pour mes proches aussi.
Ainsi le plan réussi, le reçu d’un versement très important sur un compte anonyme, me mettant à l’abri avec ma famille sous les conditions que je diffuse la mort.
Corps pesant, tête lourde entre mes mains, une odeur me fait suffoquer, l’envie de rendre, mes membres n’ont plus d’ossature, mes muscles sont sans force.
L’écorce de mon corps est en sueur, j’ai peur de répandre le malheur.
L’heure est au ménage dans les chambres, une jeune voix à travers la porte me demande si je veux qu’elle intervienne, ma voix tremble en lui demandant de ne revenir que demain, en espérant être toujours vivant.

Avant cette minute, j’étais dans mes premières heures de vacances bien méritées, je rangeai mes affaires dans mon vestiaire, je suis docteur dans un laboratoire de recherche.
Mèche de cheveux déplacée par l’oreiller, une goutte de sang me chatouille le nez.
Assez rapidement, je sors de ma léthargie, mes yeux regardent la glace qui me glace.
Face à l’habitude de l’expérimentation des poisons dans mon labo, mon attitude à lever mes yeux vers le soleil, cet endroit que j’aime tant, me fait comprendre le risque important que je porte.
Sorte de momie, le cerveau endormi, ou plutôt paralysé, je suis le premier porteur de ce bacille, le cas index qui va faire vaciller toute l’humanité.
Réanimé par l’air vif du matin sur mon petit balcon de ma chambre, je regarde le ciel bleu, les rayons du soleil sont chauds, moi, je suis glacé.
Muté depuis deux ans dans une autre ville, je suis à trois cents kilomètres de mon domicile, de ma famille, donc je réside dans un petit hôtel à bas prix la semaine.
Certaines périodes, je demande à ma femme et mes enfants de me rejoindre, surtout les week-ends prolongés.
Isolé en permanence, au labo, dans ma vie, je suis habitué à la solitude, là, la présence de ma sentence m’habite pour l’éternité.
Inondé d’air et de chaleur, en ouvrant légèrement ma fenêtre, j’ai peur, impossible de penser à autre chose que la vie.
Aussi vite que la lumière, je m’interroge sur mon sort, sur le sort des autres vies.
Épidémie à perpétuité, tous ces peuples confinés, indigné, je crie tout haut : plutôt mourir consumé pour les épargner.

Les jolies fleurs de mon rosier sur mon petit balcon, le ciel bleu, n’ont plus le même aspect qu’avant.
Maintenant tout est pâle et blanc, tous ces enfants, ces femmes, ces hommes dans la rue ont des airs de revenant.
En regardant le soleil, qui semble s’interposer entre ce germe et moi, je distingue deux colombes qui battent des ailes, le message est clair, je n’ai plus que deux semaines de sursis.
Si nous sommes tous condamnés à une mort décalée dans un délai incertain, la mienne est bien calée.
Prononcé du fond de mes entrailles, il y a quelques heures, mon arrêt au jour doit contribuer à ce qu’un grand nombre d’humains puisse continuer à respirer au grand air, circuler à leur convenance, ne soit pas cloîtré pour leur sécurité.
Degrés stade un, je me sens déjà sale, les murs de mon petit réduit semblent être recouverts de cette bactérie qui me nuit.
Si je me tourne vers le jour de la fenêtre à présent, il y a en plus des vitres, des bâches en plastiques qui empêchent de diffuser cet hyperactif.
Nocif à grande vitesse, il va traiter mes derniers jours avec une rudesse, une brusquerie inouïe.
Puis, je me dois en tant que médecin, de ne jamais inculquer à quiconque du poison, j’ai à passer ma vie dans la pureté à exercer ma profession.
Foison de questions, mais la seule amélioration de mes derniers jours, en tant que prisonnier, sans que personne ne supporte ma camisole qui me paralyse, est de les passer au plus près de ma famille.
Camille, l’aînée de mes deux filles, quinze ans, submerge mon téléphone : d’Émojis.
Aussi bien des cœurs, que des visages avec des larmes, que des smileys aux grands sourires.
Pire encore, Alice, dix ans est admiratrice du message vocal de WhatsApp sur le téléphone de sa mère.
L’air me manque, la brutalité reprend le dessus, je vais être exécuté sans pouvoir les embrasser une dernière fois.
Parfois, mes poumons marchent au ralenti, pris entre ces quatre murs, sans liberté vers l’extérieur, mon terme approche, le seul moyen de moins souffrir de mes angoisses, est d’observer ma famille au plus vite.
Suite de manœuvres aussi complètes que possibles, ma force physique diminue peu à peu, la propagation doit être stoppée dans cette chambre avant que je parte, même agonisant.
Désinfectant du sol au plafond, en passant par tout ce que je peux envelopper dans des sacs-poubelles, je suis masqué, ganté, recouvert de ma combinaison de travail en laboratoire.
Pouvoir sortir en toute sécurité, ne pas contaminer les scènes et l’espèce humaine qui m’entourent, je dois attendre la nuit profonde pour ne pas faire mourir d’autres espoirs de vies.
Vendredi, 2 heures 6 minutes, encombré de tous mes sacs de déchets empoisonnés, je frôle le parquet des couloirs avec mes sur chaussures, les pièces alignées numérotées sont peu occupées, la cour enfin, je cours à ma Tesla d’entreprise, mon sépulcre est plein.
Bien chargée, ma batterie va me permettre de circuler jusqu'à une autre cellule, des frissons de fièvre me descendent dans tous le cops.
Lors du trajet, durant trois heures environ, je n’ai pas pu faire la différence entre, vision, réalité ou rêverie.
Assis encore au volant, mes mains sont moites, mes vêtements sont à essorer, je suis prêt à m’évanouir, tomber en syncope, devenir fou.

Sous les fenêtres de mon appartement, au quatrième étage de l’immeuble du boulevard, tout est noir.
Voir le jour à peine se lever, je me dirige de l’autre côté de l’artère principale, juste en face de chez moi, ma voiture est déjà garée dans le parking de l’hôtel.
Bel établissement moderne pour mes dernières heures, la réservation se fait par carte bancaire, sans contact avec un réceptionniste, cela m’évite le risque de contagion.
On distingue le hall garni de distributeurs de boissons, de plats chauds et froids.
Choix de la chambre, l’établissement est en partie vide, j’ai favorisé l’étage en face de mon domicile, celui de ma famille, de mon ancienne vie.
Parmi les seules figures çà et là de la rue, deux chats aux yeux vifs comme des points lumineux se frottent à moi en me regardant comme un spectre recouvert de ma tenue de lépreux.
Affreux à voir sous mon ensemble, le virus se répand rapidement, je grelotte de froid, mes dents claquent, je maigris, je n’ai plus de goût à tout, je ne sens plus rien, ma respiration est pénible.
Impossible de reste debout au stade deux, degrés de fièvre élevés, je m’écroule sur le sol, une violente douleur de tête, j’ai des secousses convulsives.
Vives manœuvres de mes maîtres de hautes œuvres, ils m’ont suivi, ils m’ont pisté, ils savent où je suis, mon téléphone ne cesse de vibrer, ils me demandent de ne pas tarder l’exécution, je suis toujours évanoui.
Fini pour moi, les saisons, les abeilles dans les fleurs, le miel, la nature, la liberté.
Dès lors, je ne suis plus seul, aucun moyen de leur échapper, il faut cependant que j’essaye, je me lève, un pas, puis un second, ma tête est pesante sur tout mon corps bien affaibli.
Infinie distraction à présent dans cette combinaison, je ne peux que me déplacer lentement vers les rideaux de la fenêtre de ma chambre pour espionner la vie de ma famille.
Camille m’écrit des mots gentils avec son portable, l’Émoji avec un cœur et un point d’interrogation réveille mon imagination, pas de raison que je n’écrive pas moi-même.
Suprême idée que ma fille bien-aimée vient de me donner, je lui réponds que je l’aime du plus profond de mon cœur, avec des Émojis de toutes les couleurs. 

Froideurs dans le dos, mon aigreur est légèrement revigorée.
Recomposer en un tout, toutes mes pensées éparses déci de-là, dans ce que je m’apprête à écrire, soit utile un jour à chacun.
Un lien à bien des sociétés, afin que cela sauve des vies de quelconques gents, des malheureux, ou même les coupables de l’agonie à laquelle je suis condamné.
Publié peut-être un jour après ma mort, moi, je ne suis plus à sauver, mais il faut épargner une grande partie de l’humanité.
Marié depuis seize ans, mon épouse a gravi les échelons dans une maison d’édition, elle est actuellement à la direction médicale.
Journal de mes dernières heures, dans mes dernières souffrances, je puise dans mes ultimes forces physiques, ce recueil que je lui adresse à son bureau, va apporter, je l’espère, un immense et profond enseignement.
Agonisant dans cette progression de douleurs, il y aura, j’espère un après, comme une autopsie intellectuelle des valeurs, de profondes leçons d’enseignements sans exécuter des innocents.
Évidemment, il va falloir penser à un monde durable, social, éviter les déferlantes sur les continents vieillissants, accompagner du mieux possible les anciens.
Bien en arrière-plan, continuer à vivre avec les pays Européens aux ralentis, supporter deux puissances mondiales qui se livrent une bataille économique, avec des domaines bancaires de plus en plus efficaces qui assurent des systèmes financiers énergiques, dans le cas d’une brutale dégradation économique.
Systématique domino, cette partie donnera lieu à faire face à une répercussion sur les salaires, les impôts, les valeurs boursières, les faillites, le chômage, les conflits sociaux, politiques, et le système de santé.

Poser les mains sur mes yeux fermés, après avoir envoyé l’e-mail à mon épouse, me fait un peu oublier le présent tourmenté, je me projette dans le passé, les souvenirs de ma première rencontre avec elle, me reviennent. 
Pleine de pensées sombres et sidérées, je me fraye un chemin dans les allées du lycée de notre premier rendez-vous.
Sous les chênes, beaucoup de cœurs se sont déchaînés pour les filles, le mien battait que pour une seule.
Seul, très souvent, ces arbres étaient réservés aux amoureux, donc je n’étais pas de ceux qui se bâtaient pour ramasser des trèfles pour leurs amoureuses du moment.
Dans ce parc, solitaire, mon air calme en surface est en fusion dès son apparition.
L’impression que j’ai eu ce jour-là, est toujours la même aujourd’hui quand je la vois, et qu’elle est dans mes bras.
Pas plus de dix-sept ans à l’époque, cheveux et yeux noirs, peau brune, lèvres rouges, la petite descendante Italienne me demande d’aller ailleurs que sous les chênes.
Pleine d’assurance, moi, je suis en transe même en ce mois de décembre.
Prendre ma main, nous marchons lentement, je suis fier, tremblant, elle me parle tout bas, je suis sans voix.
Soit je la suis, soit je reste là, elle me lâche la main, et se met à courir, je respire un grand coup et je cours, je sais que ce ne sera pas pour le pire, mais le meilleur avec Elena, mon cœur.
Bonheur de seize années, elle est la femme qui a fait l’homme que je suis. Assis sur ce lit, face à cette fenêtre, je devine tout son être, ses prunelles et ses longs cils noirs.
Croire que nos têtes ne se toucheront plus, que nos bouches ne se rapprocheront plus, tout à coup, je me retrouve dans le plus grand des silences, triste avec cette euphorie dans le cœur, je me souviendrais d’elle toute ma vie.
Petit bruit dans mes oreilles, mon téléphone me réveille, ma femme m’informe par SMS qu’elles vont passer le week-end à la campagne, à cet instant, je replonge dans mes souvenirs pour retrouver mes ravissantes filles, Camille et Alice.
Nourrice durant neuf mois, Elena a obtenu deux jolis résultats, joie, rires, après les souffrances des accouchements, c’est, depuis un émerveillement.
Évidemment, j’ai frayé ma présence en tant que père, le mieux que j’ai pu faire.
Parfaire ce que la nature nous a donné, tout d’abord minéral, puis flore, et ensuite s’éclore en animal, la femme, venue de la poussière, donne naissance avec la magnificence de Dieu.
Merveilleux moments de perfections, des gènes de leurs molécules d’ADN m’appartiennent.
Pleines d’espérances, mes prières m’entraînent dans un long sommeil.
Merveilles de la nature, pareille aux abeilles, aux papillons, sœurs pour l’éternité, elles ont pour destinée les champs en horizon.
Prénom Camille, parce qu’elle brille, Alice, parce qu’elle est un délice, elles ont la terre pour demeure et le ciel pour toit, en ce lieu, qu’elles ne connaissent ni souffrances, ni chagrin, c’est ce que je leur souhaite.

Cet isolement, ce confinement, est le bagne incarné, tout autour de moi est la captivité sous toutes ses configurations.
Versions, murs, portes, fenêtres, serrures, clés, chambres, appartements, maisons, elle me couvre, m’encercle, me verrouille, me surveille, comme avec les yeux de mes vigies.
Aussi, que va devenir le monde, si je suis leurs instructions criminelles ?
Celles, et ceux qui seront contaminés, nombreux seront décédés, seront hospitalisés, les autres confinés, le monde sera sous surveillance constante, une quarantaine incertaine, tant qu’un remède ne leur vient en paix.
               
Parfait moment d’accalmie, rien n’est fini, bien au contraire, un véhicule aux vitres teintées est stationné de l’autre côté du boulevard, ils m’observent, moi, je contemple le retour de ma famille.
Camille, Alice, Elena, toutes les trois réunies devant mes yeux, je remercie Dieu.
Milieu de soirée, je suis prêt, je me suis préparé à ce fossé, entre hier et aujourd’hui depuis cette tumeur irréversible, mais, y être précipité avec intention de distribuer la mort, toute ma présence d’esprit a tout à coup disparu.
Perdu dans un moyen de fuir, n’importe lequel, il faut que je trouve un moyen quelconque, leur message est clair, la genèse du génocide est pour samedi, nous partirons avant l’aube pour l’aéroport Paris Charles De Gaulle, terminal des départs internationaux.
Beau spectacle de l’autre cote de la vitre, je fais un pas, puis je peux en faire un autre, la lourdeur de ma tête écrase mes jambes sans muscles, cependant, je me traîne jusqu'à la baie vitrée.
Condamné à ne plus entendre leurs voix, sentir leurs fraîcheurs, les prendre dans mes bras, caresser leurs cheveux, ma poitrine est amplifiée de soupirs.
Rires sur leurs visages, scène sans paroles, mon dernier film est muet, mes mains caressent leurs ombres sur les vitres de la fenêtre.
Êtres que j’aime profondément, que je vois, que je regarde, je leur parle, elles ne me répondent pas.
Là dans cette antichambre à attendre la fin, parce que je vais mourir et qu’elles ne le savent pas, mon dernier baume au cœur est de voir leur bonheur de l’autre côté du boulevard.
Hagard dans mon regard, je ne tiens plus à rien, mes amours disparaissent dans d’autres pièces de l’appartement, je ne les vois plus, c’est la solitude, je suis perdu, je me suis abattu sur le lit.
Ainsi, je suis prêt pour ce qu’ils vont me faire faire.

Précaire raidissement au degré trois, il faut que je pense aux criminels qui me surveillent et qui veillent à mon infamie.
Averti par leurs SMS, samedi 5 heures 10, il est temps de traverser les couloirs et descendre les escaliers.
Arrivé au parking, ma Tesla est déjà ouverte, elle est télécommandée par mes bourreaux à distance.
Malchance pour les deux chats qui se sont frottés à moi il y a quelques jours, ils sont raides sous ma voiture, le germe que je dois livrer est destructeur.
Couleur noire, vitres tentées, leur véhicule est à bonne distance pour éviter la contagion avec moi.
Voix basses pour ne pas réveiller le peu de client dans l’hôtel, comme un frémissement dans le bas de mon dos, un homme recouvert de la combinaison de protection, du masque, des gants et des surchaussures, est à deux mètres, pour les dernières instructions.

- Précautions ultimes, nous allons vous guider avec notre Smartphone jusqu’au parking de l’aéroport, des départs internationaux.
Au milieu de tous ces voyageurs en attente, face au panneau électronique des vols en partances, terminal 2 E, vous devez vous mélanger, parler, échanger, serrez des mains, tousser, pour propager la source du mal.
Normal, vous êtes le cas index, le patient zéro, la première personne contaminée pour répandre l’épidémie dans tous les pays.
Puis environ une, ou deux heures, après avoir diffusé le virus parmi tous ces peuples, vous aurez dans la consigne 34, code 403, une réserve d’oxygène et la substance pour neutraliser l’effet du poison sur vous et votre famille au cas où.
D’où le processus que vous ne pouvez ni enrayer, ni renverser.

Regarder autour de moi, devant derrière, sans tenir le volant, ne rien faire, la voiture se dirige seule vers l’aérogare de la mort.
Lors de notre fin, comme il est écrit, le départ vers les cieux est un bon arrangement, Dieu sait mieux ce qui est bien pour nous.
Sous peu, tout sera fini pour moi, que ma femme et mes filles s’aiment pour toujours, qu’elles pensent un peu à moi, il n’y a guère autre chose que cela sur terre.
Lumières étincelantes dans mes yeux, des couleurs se diffusent dans l’habitacle de la voiture.
Tournure de bleu sur une partie, une température de luminescence évolue.
Plus opaque en partie, brillante, jaune orangé, une zone plus pauvre en oxygène progresse vers l’incandescence.
Chance pour l’humanité, mauvais sort pour le complot, j’ai court-circuité le noyau central des fusibles de la Tesla.
Là, elle a pris feu, la voiture est en flamme, l’alarme sonne fortement, elle s’arrête immédiatement, le véhicule des tortionnaires me heurte de plein fouet, formant un immense brasier.
Arrivé au stade quatre, 1 500 º C, il est 6 heures du matin, tout le monde est libre de tous mouvements, pas de confinement, pas de couvre-feu, le personnel soignant de tous les établissements de santés est à son rythme normal, tout est fini grâce au destin, que grand bien nous fasse.

Anas De Bernieras

























                     

        





                                    









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